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Reconversion de la base de Lorient-Keroman : un saccage qui coûte cher

8 Jan

Lorient n’en finit plus de régler ses comptes avec son histoire récente tumultueuse. La Marine a rendu à la ville de Lorient le site de l’Arsenal sur la rivière du Scorff : la construction de la ZAC Péristyle est prévue et entre actuellement dans sa phase active, quatre ans après l’achat par la ville de 27 hectares de l’enclos du port à la Marine pour 5 millions d’€.

Hormis quelques bâtiments du XIXe et les deux alvéoles de la petite base sous-marine du Scorff, construite par les Allemands en 1941, tout le reste sera détruit. Au nombre de ce qui doit disparaître, deux bâtiments des années 1960, à savoir l’infirmerie rasée d’octobre 2011 à mi janvier 2012 et une caserne abattue de mai à octobre 2011, mais aussi plusieurs blockhaus. Deux d’entre eux ont été détruits, de février à juin pour le premier, de juin à octobre pour le second. Par ailleurs, l’infrastructure pour descendre les sous-marins, le slipway, a été recouvert de sable et le blockhaus centrale électrique, le E-werk, détruit. Tous ces travaux, ainsi que l’extension réalisée pour la Cité de la Voile défigurent le site et mettent gravement en péril la lisibilité et la conservation de ce patrimoine historique pour les générations à venir.

Photo Yohanlanester Intérieur de l'un des blockhaus détruits. Dans un état quasi-neuf.

Photo Yohanlanester Intérieur de l’un des blockhaus détruits. Dans un état quasi-neuf.

Sur le site, six blockhaus  abritaient des casernements (Saltzwedel kaserne) pour les marins de la base sous-marine du Scorff, à raison de 219 couchages par blockhaus. Deux autres blockhaus, dont un derrière la place d’Armes (transformé depuis en salle des ventes, c’est le blockhaus 4 bis) sont deux fois plus grands. Ils ont été tous réutilisés par la Marine et sont restés pour la plupart en très bon état ; ceux qui sont actuellement détruits ne dérogent pas à la règle. L’un d’eux a été un stockage de TV Breizh. Pour une fois – cela mérite d’être signalé – les matériels intérieurs encore conservés (lits, lourdes portes coulissantes, portes de secours) n’ont pas été envoyés à la ferraille mais transmis au musée de Saint-Marcel et aux associations férues du patrimoine bétonné des alentours. Ces blockhaus seront remplacés par des immeubles, des équipements publics et l’Hôtel de Ville de Lorient – le service patrimoine assure cependant que le blockhaus sous la cour de l’Hôtel Gabriel n’est pas menacé et que celui derrière la place d’Armes, serait, « dans la mesure du possible« , conservé. Les blocs de béton de la base devraient être convertis en port à sec, sans que l’on sache pour l’instant le montant des travaux nécessaires.

Carte de la future ZAC

Carte de la future ZAC

C’est que tous ces travaux coûtent très cher, et les événements organisés autour de la Cité de la Voile plus cher encore. Ainsi, les deux dernières éditions de la Volvo Ocean Race (VOR), furent un échec en nombre de visiteurs, mais très VORaces en argent. Près d’un million de visiteurs étaient annoncés au doigt mouillé. Le vent a tourné, et il n’en vint que 250.000, provoquant l’ire des commerçants calmée par un rabais. Tout cela n’a pas arrangé les finances de l’association organisatrice, Lorient Grand Large, créée par l’agglomération. L’organisation de ce qui n’est que l’avant-dernière étape de la VOR s’est traduit par un déficit de 600.000 €, payé par les contribuables. Lorient agglomération pourrait se désengager de la course, et priver la Cité de la Voile de sa seule occasion d’être connue. Alors on ne pourra plus éviter la question : à quoi sert-elle et peut-on donner un autre avenir au béton teuton de Lorient ?

La base sous-marine de Lorient souffre de la folie des grandeurs la mairie locale, comme actuellement la Loire-Atlantique, à Notre-Dame des Landes, souffre de la folie du ci-devant maire de Nantes, actuellement Premier Ministre. On ne peut que déplorer le saccage de la base sous-marine. On ne peut que regretter qu’au moins un des blockhaus – en bon état – ne soit conservé à titre de témoignage historique, comme si une fois encore, de Brest à Saint-Nazaire et d’Ancenis à Saint-Malo, les « grands projets » d’urbanisme devaient effacer tout souvenir, toute trace de notre Histoire.