Quinze à vingt mille manifestants contre le mariage pour Tous à Rennes

5 Mai
Manifestation contre le mariage homo. Photo Gilbert Engelhardt

Manifestation rennaise contre le mariage homo. Photo Gilbert Engelhardt

La mobilisation contre le mariage gay ne faiblit pas, même après le vote de la loi. Ce dimanche, des manifestations régionales avaient lieu  à Rennes, Toulouse, Montpellier, Lyon et Dijon. Le but : montrer au pouvoir la détermination des opposants contre un changement radical de société imposé par les députés PS – ce que les détracteurs du mariage gay appellent un « déni de démocratie ».

Le défilé rennais a réuni près de 20.000 personnes selon les organisateurs, six mille selon la police (officiellement), « au minimum quinze mille » selon la DCRI. Il est toujours intéressant de constater une fois de plus que les appréciations dans les médias locaux varient du simple au double, de « quelques milliers » de manifestants pour Ouest-France à « plusieurs dizaines de milliers » pour France 3 Bretagne. En dehors des drapeaux bleus, blancs et roses de la Manif pour Tous, le cortège plein de Bretons se singularisait par une assez grande présence des Gwenn ha Du et des Kroaz Du. Quelques sacrés cœurs vendéens aussi. Les manifestants ont notamment clamé « François, t’es foutu, les Bretons sont dans la rue ». Le député Marc le Fur a longuement parlé de la nécessité de la réunification bretonne administrative… puisque la réunification du peuple Breton était déjà le fait dans la rue où étaient présents de nombreux manifestants de Loire-Atlantique.

Le défilé a fait recette. Photo Gilbert Engelhardt

Le défilé a fait recette. Photo Gilbert Engelhardt

Les autres cortèges ont vu une affluence assez hétérogène. Ils étaient une quinzaine de milliers aussi à Lyon (9.000 selon la police  qui en comptait 22.000 au même endroit le 17 novembre lors de la première manifestation régionale de la Manif pour Tous ; 20.000 pour les organisateurs). A Lille, environ 900 personnes se sont rassemblées devant la Préfecture. A Toulouse, ils étaient 12.000 venus de tout le sud de la France, du Limousin à la Provence (3.500 selon la police, 15.000 selon les organisateurs) ; les forces de police les ont soigneusement séparées des partisans du mariage homosexuel – essentiellement des militants d’extrême-gauche et LGBT qui n’étaient que quelques dizaines – et qui avaient appelé à une « contre-manifestation contre les homophobes ». A Montpellier, il y avait plusieurs milliers d’opposants à la loi rassemblés (1.400 selon la police). Enfin à Dijon ils étaient près d’un millier. Et ils étaient entre 15 et 20.000 à Paris. Soit 65.000 sur l’ensemble du territoire national.

La manifestation  rennaise a nécessité le déploiement d’une centaine de CRS qui ont passé le plus clair de leur temps à empêcher une centaine de contre-manifestants – des militants de groupuscules d’extrême-gauche (NPA, CNT, Sud…) et LGBT – très mobiles et déterminés de venir provoquer les manifestants et d’aller au carton. Au début de la manifestation, deux cent d’entre eux ont entre autres agressé le service d’ordre volontaire de la Manif pour Tous et dégradé le podium, renversant et cassant des barrières. Ailleurs en France, on ne dénote pas de débordements dans les cortèges, ni à leurs abords, malgré la volonté des partisans du projet de loi et autres contre-manifestants d’envenimer les choses. De quel côté est la violence ?

L’affluence n’était pas le but de ces cortèges qui étaient essentiellement un tour de chauffe pour la manifestation parisienne du 26 mai, destiné à ne pas laisser refroidir les troupes. A Rennes où le défilé très coloré s’est écoulé pendant près de deux heures dans le centre-ville, c’est une mer de drapeaux noirs et blancs, ainsi que bleus, blancs et roses qu’a soulevé Christine Boutin qui exhortait les manifestants rassemblés sur la place de la mairie à venir à Paris le 26 mai. Gilbert, présent dans la manifestation, nous décrit une « foule jeune, très jeune, beaucoup d’enfants, de familles ; des gens très déterminés qui seront à Paris fin mai ».

Des heurts en fin de manifestation à Rennes

Un contre-manifestant (pro mariage gay) devant la manifestation pour tous à Rennes. Photo Gilbert Engelhardt

Un contre-manifestant (pro mariage gay) devant la manifestation pour tous à Rennes. Photo Gilbert Engelhardt

Plusieurs centaines de contre-manifestants – jeunes lesbiennes, CNT, NPA, Breizhistance, anarcho-autonomes, bref, « tout le gratin de l’extrême-gauche activiste rennaise » se sont livrés pendant plusieurs heures à un jeu du chat et de la souris avec les CRS dans les rues de Rennes. Du jamais vu depuis près de cinq ans. Des heurts ont éclaté au début de la manifestation au carrefour rue d’Isly/boulevard de la Liberté entre contre-manifestants et le service d’ordre de la manifestation, justifiant l’intervention de CRS. Ceux-ci sont parvenus aux environs de 16h30 à enfermer les contre-manifestants dans la rue Edith Cavell ; la « nasse » a perduré jusqu’à 17h45, lorsque les contre-manifestants ont commencé à se disperser et se sont éclatés en plusieurs groupes d’une centaine de personnes dispersés sur toute la place de la République. A 18h pile, deux journalistes de Rennes TV, petite structure indépendante d’information, Gaspard Glanz et Olivier Roth – les deux cofondateurs – se précipitent à un coin de la place où une jeune fille est agressée par un vieux monsieur. On ne sait s’il fait partie ou non de la manifestation pour Tous, mais la jeune fille es contre-manifestante et le monsieur lui aurait pincé les seins. Des personnes interceptent les journalistes.

Caméra cassée de Rennes TV. Photo Rennes TV.

Caméra cassée de Rennes TV. Photo Rennes TV.

Gaspard Glanz continue : « je rapplique avec mon associé. Il se fait attaquer par quatre personnes qui revenaient de la manif pour Tous et qui attendaient là leurs cars; elles ne sont pas contentes de voir les journalistes débarquer, et ça s’entend, ils lui font une clé de bras et des coups dans la gorge ; deux personnes se sont surtout acharnées. Vêtus de pull Ralph Lauren et de chemises à carreaux, les deux mises dans le pantalon, ils étaient âgées l’un de trente et l’autre de cinquante ans. » Les contre-manifestants se rapprochent du point de l’accrochage tandis que le journaliste vole au secours de son collègue « j’ai sauté dans le tas ; alors le cinquantenaire ne m’a pas visé moi, il s’est acharné sur la caméra en arrachant toutes les parties amovibles, la caméra a volé à 50 mètres et puis il y a eu une baston générale ». Bilan : cinq personnes en sang, dont les deux journalistes, et un agresseur de caméra qui tente de prendre la fuite, mais se voit fermement retenu par les contre-manifestants « le temps qu’un policier en civil vienne et l’écarte pour prendre son identité et les nôtres ». Les CRS étaient à 50 m et n’ont pas bougé.

Rennes TV publiera demain matin la vidéo « très parlante, on y voit vraiment bien le déroulement des heurts » et le reportage de la manifestation, « sans flouter les visages, faut pas déconner quand même, c’est une manifestation publique, après, c’est à eux d’assumer leurs actes ». Gaspard Glanz voit rouge « on a été sur la ZAD douze fois, on s’est fait parfois très mal accueillir mais on n’a pas perdu de matos, là c’est la première manif pour tous qu’on couvre et on a de la casse tout de suite ». Pour près de 2.100 € de préjudice. Rennes TV a une seconde caméra, mais de moins bonne qualité. Ne disposant pas des moyens nécessaires pour racheter une caméra neuve, elle va lancer un appel aux dons sur son site« Ce matériel a été acheté à nos frais, et on est d’autant plus hargneux de l’avoir perdu », explique Gaspard Glanz qui constate que les événements de ce soir à Rennes sont « un signal d’alarme, surtout quand on voit la haine que manifestants et contre-manifestants étaient capables de se déverser mutuellement par mots interposés, lorsqu’ils étaient face à face. A chaud, on se dit qu’on est vraiment au bord de la guerre civile ».

Une ambiance délétère qui pourrait s’expliquer par la conjonction de la crise tous azimut (économique, européenne, budgétaire, sociale…) et de l’absence de solution politique : la Bretagne s’est livrée à la gauche mais est en train de basculer, sans pouvoir cependant trouver d’alternative. Elle n’a pas la fibre extrémiste – de gauche ou de droite, ses indépendantistes n’ont jamais su lui parler ni se structurer efficacement  et la droite y défraie plus la chronique par son incapacité politique notoire  ou ses petits arrangements entre amis  que par ses propositions politiques. Bref, la Bretagne est au bord d’un abîme qui l’attire avec force, alors même que plus personne n’a envie d’être raisonnable tant le ras-le-bol est perceptible et partagé par les Bretons des cinq départements ignorés, voire insultés par le pouvoir central parisien depuis six ans.

7 Réponses to “Quinze à vingt mille manifestants contre le mariage pour Tous à Rennes”

  1. Cultive ton jardin Mai 6, 2013 à 10:10 #

    Je considère que ce combat dont je ne comprends pas le sens a fait sortir de l’ombre de bien vilaines choses, qui s’apparentent plus à la (hélas) traditionnelle « chasse aux pédés » qu’à la défense d’une civilisation.

    • CAMARET Pierre Mai 11, 2013 à 2:24 #

      Biensur j’appartiens a une generation autre ( j’ai 83 ans , mais encore jeune de corps et d’esprit .. je m’efforce pour les 2 ) je n’ai rien contre les homosexuels , je trouvais le PACS tres bien pour eux ….. il fallait l’ameliorer , d’accord nous allons l’etudier…… mais le mariage , avec bien sur plus tard l’adoption …. et bien non , cela ne passe pas

  2. M. de PONTCALLEC Mai 7, 2013 à 2:43 #

    Il est de SALUT PUBLIC d’être tous à Paris le 26 mai, à la MANIF POUR TOUS ! Venez tous nombreux !
    Militant pugnace, J’ai participé à toutes les manifs, à Paris et à Nantes, et hier à Rennes, où ce fut un grand succès !
    C’est vraiment un grand bonheur que d’être avec toutes ces belles familles, et tous ces jeunes, Français méritants et courageux. C’est la vraie France, la France réactionnaire de droite libérale.
    Il ne faut pas se laisser vaincre par les forces extrêmement néfastes au pouvoir.
    La MANIFESTATION a désormais une tournure hautement politique, et il faut en profiter, je vous l’assure, à défaut de pouvoir virer HOLLANDE, au moins lui faire peur et lui faire savoir que les Français traditionnels de culture , ça existe encore !
    MANIFESTATION LE 26 MAI ! TOUS DANS LA RUE !
    NOTRE SEUL ET DERNIER ESPOIR ! Mais nous n’abandonnerons jamais !
    Signé : un BRETON révolté contre les Jacobins socialo-communistes,( sachant que le socialisme est une perversion, le faux-nez du communisme).

    • devalliere Mai 10, 2013 à 9:45 #

      Il y a aussi de « belles familles » pour trouver cette Loi salutaire, même si elles espèrent ne jamais être confrontées au problème chez elles. Cettre Loi n’est pas une atteinte aux Libertés pusqu’elle ne retire rien à ceux qui s’y opposent au nom de LEUR morale.

  3. chevreuilb Mai 8, 2013 à 9:35 #

    Le traitement de l’info dans les grands media est toujours le même. 2 journalistes dont l’un vient d’être condamné par ailleurs clament à tout vent une agression par les anti mariages gay. Leur video de quelques secondes ne démontre rien. Tout ce que je vois c’est qu’en même temps de vrais video montrant les violences des pro mariage gay ne passent pas dans les même media! Elle est belle la démocratie et la neutralité de la presse!!

  4. gay marseille novembre 7, 2013 à 11:39 #

    Je suis de même avis que vous Monsieur Nelson, pourquoi une question de toilette déviera le débat sur le mariage pour tous? En aucun cas, on vous remercie de cet article.

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  1. Resistance | Pearltrees - Mai 6, 2013

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