Manifestants gazés en gare de Nantes : le système Ayrault tombe le masque

17 Avr

Quatre jours après que les manifestants qui bloquaient samedi 13 avril au soir le train de Caroline Fourest en gare de Nantes se soient fait charger et gazer  en pleine gare sans évacuation préalable – mettant en péril des milliers d’usagers et les agents SNCF dont plusieurs se sont fait gazer – une question taraude tout le monde : qui a donné l’ordre de cette énorme bavure, et pourquoi ? La préfecture n’a pas voulu s’exprimer. Nous sommes en mesure de répondre aux deux. Décryptage.

Le côté mou et le côté casque à pointe

ayrault-930_scalewidth_630Nous disposons d’informations très confidentielles qui nous permettent d’affirmer que l’ordre de gazer n’a pas été donné par le Préfet. Ni même par le Ministre de l’Intérieur. Mais plus haut encore. Celui qui a longtemps sévi à Nantes développe maintenant au gouvernement une hésitation molle qui tranche avec la rigidité avec laquelle il menait les affaires nantaises et imposait ses choix à tous – c’est ainsi qu’il a relancé le grand projet inutile et bientôt enterré de Notre-Dame des Landes. Rigidité à laquelle tout le monde se pliait, y compris les élus de l’opposition. C’est en quelque sorte le côté casque à pointe de ce professeur d’allemand.

Loïc Maurice (CNIP), candidat aux municipales de Nantes nous raconte son premier conseil municipal « Il y avait un curieux ballet de chemises cartonnées vertes et rouges ; attentif à tout, je l’avais remarqué. Des chemises vertes qui étaient transmises par les élus de la majorité au cabinet du maire, dont ils recevaient des chemises rouges. Alors je demande au collaborateur de l’opposition – un fonctionnaire payé par la mairie chargé de nous aider – ce que c’est que cela. Il répond avec un très grand naturel : les chemises vertes contiennent les questions posées par les élus de la majorité au maire. Les chemises rouges contiennent ces mêmes questions – reformulées dans un sens plus acceptable pour le maire et la réponse d’avance rédigée qui allait leur être donnée au conseil, ainsi que le nom de la personne qui la leur donnerait. Et les élus de la majorité se pliaient tous à ce rituel bien peu démocratique – et qui montrait le peu de considération que le maire leur portait –  comme des toutous ». Les élus de l’opposition aussi, puisqu’ils ne l’ont pas dénoncé et ont d’ailleurs fait encore mieux en se rendant incapables de s’organiser pour reprendre la ville aux socialistes, avec un niveau d’amateurisme et de tambouille interne qui frisait, tant en 2001 qu’en 2008 l’incompétence… ou la connivence.

Pourquoi alors le Jean-Marc Ayrault de Nantes, casque à pointe en Bretagne, est si mou à Paris ? Un proche de l’actuel gouvernement commente cyniquement : « parce qu’à Paris, il doit parler et négocier avec de vieux lions de la politique, qui savent comment le mater – c’est bien le diable si en des décennies de politique il n’a pas quelque chose à cacher – et de fait le tiennent par les couilles ». Si bien que le Premier Ministre est remarquablement effacé et se fait avoir dans tous les arbitrages – de Harlem Désir qui lui a été imposé à la tête du PS à Montebourg qu’il avait voulu virer et que Hollande a maintenu pour garder une caution de gauche assumée. A Nantes en revanche, Jean-Marc Ayrault garde sa rigidité, voire agit encore plus durement pour faire oublier ses revers parisiens. Au risque de causer d’énormes bavures. Comme le dit Loïc Maurice « le soir du 13 avril, le système Ayrault se démasque. Cet homme se présente comme démocrate chrétien. Il n’a été ni l’un ni l’autre et en offre une preuve éclatante ».

Un ordre absurde pour pallier au délitement rapide du système Ayrault

Alors pourquoi cet ordre ? Un proche du Premier-Ministre commente, sous couvert d’annymat : « si cela avait été à Dijon, Marseille ou même Paris, cet ordre n’aurait jamais été donné. Jean-Marc a une relation très possessive avec Nantes, qu’il voit vraiment comme ‘‘sa’’ ville, ‘‘son’’ fief ». Depuis qu’il est au gouvernement, Jean-Marc Ayrault perd peu à peu pied à Nantes, ses échecs successifs, l’incapacité du gouvernement à redresser la situation du pays défont peu à peu son aura locale. Comme il ne s’est jamais préoccupé de sa succession, ceux qui ont pris la relève à gauche à Nantes apparaissent ternes et interchangeables. Et même dans les administrations, les mouvements d’hommes et le désaveu croissant du gouvernement délitent nettement le « système Ayrault ». Enfin, comme Nantes se trouve au centre de tous les enfumages et de toutes les luttes sociales – chômeurs qui s’immolent, Notre-Dame des Landes, opposition au mariage gay (le département étant l’un des cinq plus actifs de France dans la contestation et le nombre de pétitions signées au CESE), une tension extraordinaire donne chaque jour des coups de boutoir dans la chape de plomb du système Ayrault. « Nous sommes en train de lui démolir en quelques mois vingt-cinq ans de travail, vingt-cinq ans de mandats municipaux où il s’est fait une stature locale, puis nationale, et ça le rend furieux », explique Loïc Maurice au sujet de Ayrault.

De fait, Nantes est devenue une fournaise sociale, qui n’a jamais été aussi active, tous azimuts, contre le gouvernement, la ville où peut-être ces efforts sont encore plus visibles qu’ailleurs puisqu’elle est aussi celle du Premier Ministre. C’est aussi à cause de Nantes que le Premier Ministre a empêtré le gouvernement dans l’impasse – politiquement indéfendable et condamnée par l’Europe – de Notre-Dame des Landes, projet qui depuis a été enterré par les scientifiques. Le mutisme du gouvernement – et de la grande presse – témoigne du malaise grandissant à ce sujet, de l’impact des événements de Nantes sur le moral du Premier Ministre, et par là sur toute l’action et la légitimité du gouvernement. Alors, que s’est-il passé samedi soir en gare de Nantes ? Une tentative maladroite d’inverser le cours des choses, de sauver le système Ayrault. L’effet est tout à fait inverse : le système Ayrault coule à pic, Nantes respire plus librement, et le gaz lacrymogène fait pleurer à Matignon et à l’Elysée. C’est l’odeur d’un scandale d’Etat, le cri de manifestants pacifiques – et de milliers d’usagers d’une gare bondée qui ne l’étaient pas moins – sacrifiés à l’égo d’un homme. Inadmissible, fut-il l’ex-maire de Nantes.

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